mardi 5 janvier 2021

Comment ne pas être Baudelairien ?

 

 « Comment ne pas être Baudelairien ? »


Je dois l’avouer j’étais Charlie bien avant les attentats de janvier 2015. Charlie je suis et je resterai. Je suis Charlie Baudelaire pour la vie. 
Avec lui la rencontre s’annonçait inexorable. Je remplissais mes soirées mélancoliques d’adolescent de poésie. Je tentais de me singulariser une plume à la main planant au dessus des hommes et des océans comme l’Albatros... j’étais pareillement sensuel face à une parure de bijoux sur une peau nue et dédaigneux du temps qui passe face à l’horloge et son inexorable tic-tac. Du moins je me plaisais à le croire !
Mon tempérament était baudelairien de naissance. Trop sensible sans doute. Une chance ? Pas certain. 


Bien sûr le maître me dépasse largement dans la démesure : 


Il aimait les putes sans modération, l’odeur des charognes flattait ses narines et il se livrait à tous les dérèglements, toutes les débauches et les provocations. Il était plus camé qu’une épave de la Porte Dorée, plus menteur qu’un arracheur de dents argentées, plus salaud que le dernier des saligots. Il dépouilla sa mère de son argent, frappa sa muse les soirs de délire éthylique, insulta le peuple belge dans un pamphlet méchant, en autres exploits pour justifier son dandysme et faire jaillir sa poésie née de l’outrance.
Outrancier mais jamais vulgaire. C’est un des rares poètes dont je peux réciter par cœur ces vers qui ne l’ont donc pas suivis au tombeau. 
Adolescent mon père nous déclamait, exalté, le poème « il faut être toujours ivre » tout en réclamant la salière à table. La vie ne manque pas de sel quand on l’agrémente de poésie. 


Ce Jean Teulé est, comme tous les opus de l’auteur consacrés aux poètes - il a écrit aussi sur Rimbaud et Villon, en autre - érudit, precis, bien mené.


On peut presque sentir la peau et la chevelure poivrée de la noire Jeanne Duval, bander devant ses provocations vicieuses (pardon mesdames), et aussi tomber amoureux de la « présidente Sabatier », son esprit et sa beauté qui mettaient Paris et tous les grands artistes de l’époque à ses pieds. 
Et que penser du Baudelaire de la fin rongé par une syphilis qui le rend paralytique puis apathique au point que le seul mot qu’il soit encore capable de répéter est le juron « crénom » !?
Un poète qui perd ses mots n’a plus de raison de demeurer sur cette terre. Baudelaire est mort à 46 ans. Mais son empreinte est si forte lui « le poète idéal » que je me demande encore comment ne pas être baudelairien intensément quand on s’intéresse un tant soit peu au génial dandy.



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