La présidentialisation du fonctionnement de la 5ème République est la cause principale des difficultés de fonctionnement du Parti en situation majoritaire.
Dans un régime où les principales décisions du quinquennat appartiennent à un seul homme, ou presque, il n'est pas étonnant que le Parti ait du mal à trouver un rôle à sa mesure. Ce qui est vrai pour le Parti socialiste l'était aussi pour l'UMP sous Sarkozy.
Plus largement, la séparation des pouvoirs est brouillée dans un régime présidentiel qui conduit à la domestication du Parlement.
Pour le parti socialiste, la mise en place des primaires pour la désignation du candidat des socialistes à la présidentielle n'a fait qu'ajouter à l'effacement progressif du PS sous la 5eme république, en renforçant la personnalisation de la désignation et en privant le PS du rôle qui était jusque là le sien, celui qui lui permettait de procéder au choix d'un candidat à la présidentielle par vote des militants/adhérents.
L'exfiltration d'Harlem Désir après une défaite aux élections municipales d'une ampleur sans précédent ne doit pas être sur interprétée puisqu'on voit que les causes de l'effacement du parti sont avant tout structurelles, liées à la nature du régime de la 5ème.
Harlem s'était certes "emmuré vivant" au sein du parti ces derniers mois. Il était progressivement devenu inaudible. Son départ devenait inévitable. il aura tiré lui même d'ailleurs les conséquences de cette situation en proposant sa démission.
J'avais senti monter dans notre fédération ces derniers mois un sentiment d'exaspération vis à vis du premier secrétaire national qui ne nous avait d'ailleurs pas rendu les meilleurs services chaque fois que nous avions eu besoin de lui :
Je n'ai jamais dissimulé aux militants le manque de soutien du national à la suite de l'invalidation de nos deux députés en 2013, j'ai toujours dit la vérité sans fard sur les tentatives de parachutages répétées auxquelles la fédération a du faire faire lors de l'organisation des législatives partielles, et doit encore faire face aujourd'hui alors que s'approche la date de la prochaine sénatoriale en septembre et que notre liste n'est toujours pas validée.
il ne rentre dans mon jugement sur le départ d'Harlem aucun sentiment de revanche :
J'ai pu apprécié souvent les propos de Harlem sur l'Europe, apprécié aussi son combat sans relâche contre le FN. Il reste une personnalité importante de notre parti, il occupera un portefeuille ministériel important et je lui souhaite à titre personnel une pleine réussite dans cette nouvelle tache.
Son bilan à la tête du PS restera cependant comme celui d'un échec dans une situation politique générale particulièrement dégradée qui nuance donc la part de responsabilité individuelle imputable à cet échec.
Il faut maintenant aller de l'avant :
Redresser le parti, redonner une parole audible à son premier secrétaire, c'est accepter que le PS ait une feuille de route qui ne se limite pas uniquement au soutien à toutes les décisions politiques prises par le Président de la République, son premier ministre ou son gouvernement.
De la même manière que nous avons besoin d'un rééquilibrage de notre fonctionnement institutionnel, pour un rôle renforcé du parlement, nous avons besoin d'un rééquilibrage à la tête du PS :
j'attends du nouveau premier secrétaire, de la nouvelle direction nationale, qu'elle soit avant tout le gardien de nos valeurs :
Nous sommes socialistes, nous avons une certaine idée de la justice sociale, de la solidarité, du rapport à l'autre.
L'affaire Léonarda a rappelé cruellement que des responsables socialistes pouvaient parfois oublier la matrice dont ils étaient issus. Nous sommes le parti de Jaurès et de Blum et nous devons le rester et l'assumer dans cette phase de notre histoire difficile.
J'attends du nouveau premier secrétaire et de la nouvelle direction nationale qu'elle assume également de donner la parole aux militants :
Proposer rapidement l'organisation d'une convention sur l'économie, proposer la convocation d'un congrès d'ici quelques mois, me semblerait des premières mesures salutaires pour libérer la parole et entendre ce que les militants ont à dire :
Je suis persuadé qu'aujourd'hui il existe un souhait majoritaire d'inflexion de notre politique qui ne peut se limiter au seul pacte de responsabilité.
Le Président de la République en annonçant un "pacte de solidarité", en nommant un nouveau gouvernement, semble avoir entendu ce message.
Mais aujourd'hui si la substance même de ce pacte n'est pas précisée, et si ce pacte devait se limiter à l'habillage politique de mesures déjà existantes (loi de refondation pour l'école, annonce de baisses d'impôts pour les bas salaire), je crains que le compte n'y soit pas au moment où nous devrons nous représenter en 2017 devant les électeurs.
Le contenu du pacte de responsabilité et les contreparties pour favoriser l'investissement des entreprises et l'embauche me semble aussi devoir faire l'objet de notre vigilance, et de celle du premier secrétaire national et de la direction qui l'entourera.
Nous aurons l'occasion de debattre dimanche en Conseil fédéral de ce que nous souhaitons pour redresser le Parti. J'invite également chaque militant à s'exprimer sur le forum FFE.
Nous devons agir avec responsabilité, conscient que nous avons devant nous des échéances européennes qui nous imposent de rester unis, que nous sommes face à un contexte de crise économique et politique qui implique de notre part de serrer les rangs.
Mais nous devons aussi entendre ce que nous dictent nos convictions et notre conscience pour que des évolutions et des changements nécessaires. Nous devons accepter de donner de la voix pour nous faire entendre de ceux qui gouvernent aux destinées du pays.
Nous ne devons être en somme ni des béni oui oui, ni des béni non non, et trouver en nous et pour nos concitoyens le meilleur équilibre politique capable de nous permettre de gagner la bataille de l'emploi et de sortir de l'ornière actuelle.
Amitiés socialistes
Boris Faure
1er secrétaire fédéral FFE
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