jeudi 25 février 2021

Les maladies honteuses ou la distinction sanitaire

 « Les maladies honteuses ou la distinction sanitaire»


Ce matin je me suis levé courbaturé, une légère fièvre au front, les yeux plus collés que d’habitude. J’essayais d’osculter mon cœur à l’oreille. Pour un peu je l’aurais senti déréglé battant une cavalcade annonçant un mal sournois. 


J’étais fier de moi. Je me suis dit tout de suite « je l’ai enfin, le Covid » en me rappelant que le Covid c’est féminin et que c’est devenu très commun.


Aujourd’hui pour se distinguer, comme dirait Pierre Bourdieu, la Covid ne suffit plus. Bien sûr une fièvre Ebola serait plus indiquée. Cela provoquerait une évacuation de mon quartier. Avec un peu de chance l’armée belge serait convoquée pour verrouiller la ville. Même si bien sûr invoquer l’armée belge fait déjà un peu farcesque. Et manque aussi de panache. Ebola à Bruxelles c’est comme mourir d’une indigestion au Biafra c’est peu commun et à la limite du crédible. Pour bien se distinguer il faut quand même être cru. 


Je faisais certainement fausse route sur le terrain de la distinction sanitaire. 


Alors j’ai songé plus grand, plus vaste, plus fort, plus poétique. Je suis tombé sur le dernier Jean Teulé. Oui le grand mec de l’assiette anglaise qui fait des livres et qui a toujours une salade frisée flapie en guise de chevelure. Donc son dernier livre parle de Baudelaire et aussi de sa syphilis. Voilà ! c’était là qu’il fallait s’aventurer, chercher les fleurs du mal à la racine de pissenlits, convoquer les chrysanthèmes par bouquet : ce matin je décidais donc de mourir de la syphilis de ce pas. Ça vaudrait formidable distinction sanitaire ! 


Bien sûr le plus drôle dans la syphilis c’est quand même quand on l’attrape. Une maladie honteuse comme celle là ça sent la fornication crispée  dans une ruelle sale, les amours tarifés avec une fille de mauvaise vie a tendance non abolitionniste.


Manque de pot, dans mon quartier bourgeois et propre sur lui, où toutes les dames vont à la messe avec componction, où la virginité se garde comme un petit plan d’épargne, va trouver une bonne gagneuse infectée et disponible dans une discrète rue retirée et mal balayée...


Je ne pouvais pas appeler les labos universitaires pour quémander une maladie tropicale, un mal terrassant qui m’emmènerait au cœur des ténèbres et aux portes de l’indicible pour mourir tel un vulgaire hamster de laboratoire d’une fièvre Schpountz ou d’une variole variée à tendance vitreuse. 


Faire le tour des cliniques universitaires m’amènerait plus sûrement à attraper une islamo-gauchiasse fort répandue empêchant par la même toute distinction de la populace des infectés de l’université. 


C’est le cœur lourd que j’ai donc renoncé à ma distinction sanitaire. J’ai regardé la glace l’œil inquiet. Il faudrait quand même que je songe  à soigner cet acné résiduel qui m’empêchait vraiment de me distinguer au plan cutané .




13 commentaires:

  1. "Manque de pot, dans mon quartier bourgeois et propre sur lui, où toutes les dames vont à la messe avec componction" --> ces dames ne vont pas au pot ?

    Ceci dit, j'ai eu une maladie honteuse, la gale. Un cauchemar. Et je me rappelle des vannes à l'école, "eh j'ai pas la gale", bah je l'ai chopée adulte, et c'est une saloperie bien honteuse.

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    1. Mon fils l’a eu. Bien chaud... bien honteuse. J’aurais du en parler :)

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  2. On ne parle plus d'acné résiduel mais d'acné résiduelle depuis que c'est devenu très commun.

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    1. D'autre part, puisqu'on en est aux pinaillages, on est courbatu plutôt que courbaturé et on ausculte au lieu d'osculter.

      Et la gale n'a jamais été considérée comme une maladie "honteuse", vu qu'elle n'est en rien liée au commerce sexuel.

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    2. Courbatu correspond plus à un état général, du genre immense fatigue après une effort physique. Courbaturé est "plus proche" de la courbature en tant que raideur musculaire. Par exemple, on dira "j'ai trop picolé, je suis courbaturé du coude".

      Pour osculter, on pourrait imaginer que le taulier veuille cacher son coeur à ses oreilles auquel cas il faudrait bien "o" et pas "au".

      Je dis ça parce que ça m'occupe en attendant la sieste. Dans les deux cas, le taulier à tort et devra payer une tournée.

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    3. En plus, il a confondu avec Pigale.

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    4. Avoir la gale à Pigalle serait plus simple !

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  3. Il avait honte. De la maladie. La maladie rodait sans nom.
    Elle ne pouvait pas commenter tous les billets. Non plus...

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  4. Merci Fredi.
    Je pourrais vous faire le coup de la littérature n’a pas d’odeur ni de couleur politique. En réalité si un jour un étudiant en littérature reprend mon œuvre, il se rendra compte qu’elle est libertaire, individualiste, avec du mauvais esprit. Ah si la gauche pouvait me ressembler et être un peu plus mal famée et moins chichiteuse :) blague à part merci pour l’appréciation positive de ce texte :-)

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